Robert Lachance, Vice-président - Ventes, Investissements et Retraite
Drôle de question. Je ne parle pas ici d’un vaccin contre la grippe ou d’une maladie infectieuse quelconque, mais d’une maladie bien plus grave qui peut, ultimement, retarder l’atteinte des objectifs financiers de vos clients. Cette maladie est étudiée depuis de nombreuses années tant par des psychologues que des économistes, qui ont découvert plusieurs symptômes qui peuvent infecter le cerveau des investisseurs mais aussi des conseillers et embrouiller leur jugement.
Évidemment, je parle ici de la finance comportementale. L’incertitude engendrée par la guerre commerciale, tout azimut, que mène les américains envers leurs partenaires, les tweets rageurs ont un impact direct sur l’évolution économique. On voit déjà la croissance économique mondiale ralentir ce qui augmente les risques de dérapage et contribuera, fort certainement, à une volatilité accrue des marchés. Le point positif est que toutes les banques centrales sont très actives et ont adopté des politiques monétaires très expansionnistes. Présentement, 17 milles milliards de dettes souveraines (1 obligation sur 4) offrent des rendements négatifs. Dans un tel contexte, notre rôle auprès de nos clients investisseurs deviendra un élément clé de leur succès à long terme.
Les symptômes à éviter
Voici quelques « symptômes » que nous devons éviter afin de bien guider nos clients.
- Le biais de confirmation; ce biais amène l’investisseur à rechercher et à tenir compte uniquement de l’information qui vient soutenir ses propres opinions sans égard aux informations qui seraient en contradiction avec ses croyances. En bon terme, on s’entête, ce qui nous fait ultimement prendre de mauvaises décisions comme vendre ses placements et sortir du marché au mauvais moment. Prenez le temps d’écouter et d’accepter des informations qui peuvent vous heurter.
- Comportement de meute; en deux mots « fais-le, tout le monde le fait ». Plusieurs exemples existent dans l’histoire, par exemple la bulle technologique au début des années 2000. De trop nombreux investisseurs n’ont pas respecté leur zone de confort (risque) et ont bêtement suivi la meute même si le prix des actions devenait prohibitif.
- Biais d’excès de confiance; dans ce cas, l’investisseur a tendance à surestimer ses compétences dans l’analyse et ses prédictions des mouvements boursiers futurs, cela lui donne un sentiment de contrôle. Malheureusement, la première leçon à apprendre face au marché boursier est de rester humble, s’il était facile à prédire les aléas du marché boursier nous serions entourés d’investisseurs millionnaires.
- Biais de réaction excessive; ce comportement pousse les investisseurs à réagir de façon excessive à une nouvelle information tant bonne que mauvaise. Il n’y a pas (ou peu) d’analyse qui est faite de la nouvelle. Deux exemples : le baril de pétrole augmente de 2 $ aujourd’hui, l’indice boursier et les titres pétroliers progressent. Premièrement, la hausse est-elle permanente et deuxio, une partie importante du pétrole est vendu sur des contrats d’approvisionnement à long terme, ainsi cette augmentation n’aura aucun impact sur les bénéfices des entreprises. Alors pourquoi de tel mouvement de prix. Autre exemple, lors de la crise de 2008, toutes les banques canadiennes ont vu le cours de leurs actions dégringoler même si elles ne détenaient pas ou peu de produits toxiques (sub-prime) dans leur bilan contrairement aux banques américaines. Une réaction totalement excessive.
Comme vous pouvez comprendre, bien que nous soyons des conseillers aguerris, les biais comportementaux représentent aussi un enjeu pour nous.
« Agir de façon émotive, penser qu’on connait la direction ou le comportement futur des marchés, être tenté de suivre une tendance haussière en pourchassant un rendement passé ou suggérer de se retirer d’un marché baissier sont autant de pièges qui nous guettent. Pourtant, des gestes simples de notre part donneront des résultats plus intéressants. »
L’impact du conseil sur le rendement des investisseurs
Plusieurs études ont démontré l’importance que joue le conseil auprès des investisseurs. Une étude réalisée par Investissement Russell en 20191, a quantifié l’impact de nos gestes sur le rendement des clients. Nous retiendrons 3 éléments clés de cette étude sur les 5 identifiés.
- Le rééquilibrage annuel, consiste à respecter l’allocation d’actif au fur et à mesure de l’évolution des différentes classes d’actifs. Ainsi, un portefeuille équilibré 40 % revenu et 60 % croissance gagnera 0,20 % de rendement annuel tout en réduisant le risque de près de 8 %, si un rééquilibrage est fait annuellement.
- L’arrêt des comportements préjudiciables, tel que décrit plus haut, permettent d’obtenir 0,8 % de plus.
- La gestion de base des placements, détermination de l’allocation d’actif, sélection des gestionnaires et construction du portefeuille apporte une plus-value annuelle de 0,35 %.
Si cette discipline est appliquée en faisant ces trois gestes, c’est un rendement annuel additionnel de 1,35 % (sur les 2,70 % si l’on tient compte des 5 facteurs identifiés dans l’étude).
« Il est parfois difficile de convaincre un investisseur de ne pas bouger quand les baisses de marchés deviennent importantes, mais c’est pour cela que nos clients nous paient. Il faut donc garder la tête froide, garder le cap et se concentrer sur l’objectif à long terme. »
De plus, vous pouvez sélectionner des gestionnaires qui ont offert, au fil des années, une volatilité moindre en comparant, par exemple, les ratios de capture à la hausse et à la baisse. Pour terminer, permettez-moi de vous redonner quelques statistiques, comme nous le savons tous la mémoire est une faculté qui oublie.
Premièrement, des corrections de 5 % arrivent au 5 mois en moyenne et des corrections de 10 % de façon annuelle. Ces fortes variations sont donc normales et souhaitables car elles permettent à nos gestionnaires de trouver des aubaines. Il est donc inutile de réagir émotivement à ces fluctuations; cependant, de telles situations peuvent être révélatrices du vrai profil d’investisseur de votre client.
Deuxièmement, le 9 mars 2009 l’indice TSX a clôturé la journée à 7 515, le 29 mai 2009 il clôturait à 10 320, un gain de plus de 37 %. Si vous aviez été sur les lignes de côté fort à parier que vous pris beaucoup plus de temps à récupérer. De la même façon en 2019, le marché américain a progressé en date d’aujourd’hui de près de 20 %, qui l’eut cru à la fin de l’année 2018.