Transfert d’une police par un actionnaire en faveur de sa société : Comment en tirer parti de façon optimale ?
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(French only) Transfert d’une police par un actionnaire en faveur de sa société : Comment en tirer parti de façon optimale ?

Fiscalité | Jul 11, 2022 | Christian Hubert

Christian Hubert - Expert-conseil - Fiscalité et Planification successorale

 

En mars 2016, le gouvernement fédéral avait annoncé la fin d’une stratégie payante pour les actionnaires de sociétés privées qui leur permettait de transférer avantageusement une police d’assurance vie en faveur de leur société.  Avant ce changement législatif, la principale motivation pour l’actionnaire de procéder à un tel transfert résidait dans la possibilité que sa société lui verse une contrepartie équivalant à la juste valeur marchande de cette police sans augmenter sa charge fiscale. La portion excédant la valeur de rachat, le cas échéant, était donc jadis reçue par l’actionnaire en franchise d’impôt.

À l’ère de ces nouvelles règles, le traitement fiscal d’un tel transfert est désormais plus équitable du point de vue des politiques fiscales de nos gouvernements. Depuis leur entrée en vigueur le 21 mars 2016, ces transferts de police sont moins populaires mais demeurent pertinents dans plusieurs situations. Étant donné la fréquence de la question sur la contrepartie optimale, il était opportun de faire certaines mises au point afin d’établir la transaction judicieusement.

Incidences fiscales pour l’actionnaire

Produit de disposition réputé

La détermination du produit de disposition d’un contrat d’assurance vie est désormais dictée par une nouvelle définition prévue au paragraphe 148(7) LIR. À cet effet, lorsque les parties transigent avec un lien de dépendance, le prix de transfert est réputé correspondre au plus élevé des montants suivants :

1.     Coût de base rajusté (CBR) du contrat;
2.     Valeur de rachat nette;
3.     Contrepartie payée par le cessionnaire.

Par conséquent, la contrepartie versée par la société est devenue un élément déterminant du produit de disposition car si elle est plus élevée que le CBR et la valeur de rachat, elle augmentera le gain sur police à déclarer.

Gain sur police

Puisque le transfert d’un contrat entre un actionnaire et sa société ne peut bénéficier du roulement fiscal, le gain sur police correspondra à l’excédent éventuel du produit de disposition du contrat d’assurance sur son coût de base rajusté, le tout représenté par la formule suivante :

Gain sur police  =  PD (produit de disposition)    CBR (coût de base rajusté)

Il faut préciser que ce gain sur police sera imposé, le cas échéant, comme un revenu ordinaire entre les mains de l’actionnaire. D’ailleurs, des feuillets fiscaux seront émis par l’assureur afin de confirmer la somme devant être incluse à ses revenus.

Contrepartie optimale

Compte tenu que l’éventuelle contrepartie versée par la société sera prise en compte dans la détermination du produit de disposition servant à calculer le gain sur police, celle-ci devrait se limiter au plus élevé des éléments 1 et 2 précédents (soit le CBR et la valeur de rachat). Tout montant additionnel augmenterait directement le gain sur police et serait pleinement imposable entre les mains de l’actionnaire.

Pour fins d’exemple, prenons une police détenue par un actionnaire dont la valeur de rachat est de 40 000 $ et qui présente un CBR de 25 000 $. Avant même de prévoir la contrepartie, le gain sur police s’élèverait à 15 000 $ advenant un transfert du contrat. Dans ce contexte, la contrepartie pourrait s’élever jusqu’à 40 000 $ (soit le plus élevé du CBR ou de la valeur de rachat) sans que le produit de disposition en soit affecté.

Cependant, une contrepartie supérieure à ce dernier montant engendrerait un gain sur police supplémentaire dû à un produit de disposition réputé plus élevé. Vous comprendrez ainsi qu’il n’est généralement plus pertinent de connaître la JVM du contrat puisque l’actionnaire n’en retirerait pas d’avantage fiscal de se faire verser une somme plus élevée.

Incidences fiscales pour la société

Coût de base rajusté (CBR)

Le nouveau coût de base rajusté pour la société cessionnaire correspondra au produit de disposition réputé pour l’actionnaire et déterminé selon les règles précédentes.

Transferts antérieurs au 22 mars 2016

Bien que les nouvelles règles ne s’appliquent que pour les transferts postérieurs au 21 mars 2016, le législateur a prévu une réduction dans le calcul du crédit porté au compte de dividendes en capital (CDC) au moment du décès de l’assuré lorsque la police en cause avait été transférée avec les anciennes règles et que l’actionnaire avait bénéficié d’une contrepartie supérieure à la valeur de rachat. Autrement dit, si l’actionnaire avait reçu un montant libre d’impôt au moment de transférer sa police, la portion du capital-décès pouvant éventuellement être versée en franchise d’impôt sera réduite d’autant.

Autres éléments à considérer

Documenter la transaction

Afin de justifier le versement d’une contrepartie en faveur de l’actionnaire, il est fortement recommandé de produire les documents suivants relatifs à l’acquisition de la police par la société :

1)     Résolution corporative;
2)     Acte de vente.

Ces documents permettront d’officialiser la transaction et ont pour but de supporter une éventuelle vérification.

Détention corporative de la police

Au moment d’envisager le transfert d’un contrat en faveur d’une société, il est important d’en connaître les enjeux fiscaux et juridiques afin de prendre une décision éclairée. Cet aspect dépasse le cadre du présent article, mais voici quelques-uns d’entre eux :

  • La prime d’assurance n’est pas davantage déductible aux fins fiscales. Toutefois, les revenus servant à la payer ont généralement été moins imposés que ceux de l’actionnaire;
  • Les valeurs de rachat et la prestation de décès éventuelles ne pourront bénéficier de la protection contre les créanciers de la société;
  • Le transfert ultérieur du contrat pourrait engendrer un impôt autant pour la société cédante que pour l’actionnaire le cas échéant.  

En conclusion, pourquoi l’actionnaire se priverait de la possibilité de retirer des liquidités de sa société sans impôt supplémentaire? Vous avez maintenant la réponse à cette question et tous les éléments pour orienter votre client vers une transaction optimale.

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